J’étais plutôt chamboulée, avec tout ce qui était entrain de se passer. C’était tellement compliqué. Morgan, Ashley, Carl… C’était assez perturbant. Je regrettais vraiment d’être ce que j’étais, d’être venue ici, dans cette ville où je n’avais aucune attache et où je ne connaissais rien ni personne, tout ça pour m’enliser dans des embrouilles toujours plus grave et toujours plus compliquées. J’allais finir par tout plaquer, quitter la ville, me faire passer pour morte, disparaitre… Je ne sais pas. Quelque chose qui me permettrait de revivre dans un endroit où je n’aurais pas de problèmes. Ce lieu existait-il ? Il fallait bien l’espérer. Mais un endroit sans lycan ni vampire était surement illusoire quand à lui. Mais qu’est ce que nous avions bien pus venir faire dans cette galère ? Pourquoi notre mère avait-elle voulue que nous revenions ici ? Je ne comprenais pas. Elle parlait de retrouver ses racines, que la vie serait plus simple ici, plus amusante, moins stressante et moins dangereuse. Il fallait bien avouer que je me sentais bien mieux dans les rues de Philadelphie que dans celles de Forks où je craignais de me faire tuer au moindre croisement, au plus petit mouvement. Le seul avantage de cette ville était la proximité d’endroits où se cacher les soirs de pleine lune. Les bois foisonnaient, denses, immenses. Tous les ans des personnes y disparaissaient. Disparaissaient-elles vraiment ou se faisaient-elles plutôt dévorer par des vampires ou des lycans assoiffés de sang ? La mentalité de la population était entrain de changer.

Maintenant qu’ils savaient que nous existions – il était temps que j’accepte d’être incluse dans le « on » en question – les humains, la population était sur ses gardes. Ils craignaient que nous nous attaquions à eux. J’avais tellement peur du regard de mes amis sur moi si jamais je leur disais la vérité. Ils me considéreraient comme un monstre, ce que j’étais en somme. J’avais tellement de mal à m’accepter sous cette forme. Et si je faisais du mal à quelqu’un ? Sara me collait tellement, avec sa curiosité, elle allait finir par vouloir assister à une transformation. Et ça tournerait mal. Je ne voulais pas la mordre. Elle ne pouvait pas vouloir devenir comme moi. J’avais du mal à croire qu’on puisse s’apprécier comme ça. C’était pourtant le cas de certaines personnes. Qu’y avait-il de merveilleux à vivre encore et encore la même folie du monde, plutôt que d’avoir une vie bien remplie, se marier, avoir des enfants, et finalement s’éteindre heureux ? Je ne devais pas avoir la même conception de la vie que les autres. Et je ne pouvais en parler à personne. Morgan en rigolait… Carl me dirait de la fermer… Et maintenant qu’Ashley savait, elle ne me parlait plus. C’était de loin ce qui me faisait le plus mal. Je lui avais envoyé plusieurs mails, textos, l’avait appelée plusieurs fois, elle ne décrochait pas. Rien à faire. Elle devait vraiment m’en vouloir. J’avais envie d’étrangler Morgan, tout ça c’était sa faute.

Et me plonger dans le travail ne changeait rien du tout. D’habitude ça fonctionnait, mais pas là. J’avais beau faire des heures supplémentaires à la librairie, rien à faire. Je sentais toujours cette boule au creux de mon estomac, qui me nouait la gorge et m’empêchait de manger et de dormir. J’avais une tête épouvantable, les traits tirés, fatiguée, et j’avais caché cela à grand renfort de maquillage, un peu trop peut être, soulignant mes yeux verts au khôl et au mascara. J’avais retenu mes cheveux en queue de cheval haute, un jean délavé, des bottes converses montant jusqu’au genou et un pull vert clair à col en V. Ca faisait presque négligé. J’étais restée plus tard que prévu, comme d’habitude, et il faisait nuit presque noire. Je fermai rapidement le volet en métal, avant de traverser la route pour aller récupérer ma voiture et rentrer chez moi, quand une voiture déboula à toute vitesse dans la rue. Tellement vite que je n’eus pas le temps de finir de traverser la rue…

Je freinais dans un crissement de pneu, avec chance mon esprit avait continué à fonctionner malgré que je ne sois pas totalement ici, dans cette voiture. Je n'avais pas conduit depuis un moment, mais mes réflexe était toujours là. J'en étais assez content. Je fermais les yeux un instant, j'allais peut-être tuer cette personne. Le véhicule s'arrêta sans impact. J'ouvrais un oeil, quelque peu troublé de n'avoir rien senti, pas même une secousse. L'auto était à quelques centimètres de la personne. Ouf ! Celle-ci s'était statufiée, comme moi d'ailleurs, mais elle était en vie. J'avais manqué écrasé une innocente. Mais, que devenais-je ? Je ne tournais plus rond. Je sortis, confus. Je lui fis un sourire désolé en m'approchant. Que devais-je dire ou faire ? Il y avait les paroles toutes faites, mais la facilitée était-elle de rigueur dans une situation pareille ? J'avais même perdu ces petites choses qui font qu'on est humain. Jude... mais où suis-je ? Ici ou avec toi ?

Rien de casser ? Je suis désolé, j'aurais dû faire... attention ?

J'étais incapable de formuler une phrase sans poser de question. Peut être étais-je devenu un imbécile totalement coincé. Je soupirais, j'étais peut-être morts moi aussi en fin de compte. Mon enveloppe charnel était toujours là, mais j'étais vide. J'aurais dû être en colère que cette fille... enfin femme n'ai pas regarder avant de traverser. J'aurais dû me maudire d'avoir été aussi rapide et j'aurais peut-être dû remercier le ciel de m'offrir cette occasion d'oublier un peu mes soucis. Cette femme... plutôt jolie... Mais ! mais ! Jude, Jude. Je n'avais pas le droit de penser, qu'une autre fille était attirante, jamais.

Vous n'avez pas l'air bien... je peux vous aider ? Je suis vraiment désolé.

Un coup de klaxon retentit, ma voiture était au milieu de la route, bouchant la route. Et merde... Je fais quoi maintenant ? Je reste planté là ? Ou je récupère ma voiture et je disparais ?

[Désolé, c'est nul >< Je savais pas quoi écrire ><]

Il parait que quand on va mourir, on voit défiler sa vie devant ses yeux. Ce n’est pas vraiment l’impression que j’ai eus là. Un vide, un énorme blanc. Incapable de réagir en voyant les phares arriver vers moi à toute vitesse. Si vite, trop vite. Je n’avais pas la sensation d’avoir encore envie de vivre soudain. C’était comme si j’avais totalement baissé les bras. Soudain, l’idée me traversa l’esprit que c’était peut être la meilleure solution… Que comme ça tout irait surement mieux. Plus peur, plus mal… plus cette impression de tout faire de travers et de rater tout ce que j’entreprenais. J’avais vraiment envie de tout lâcher et là, ça m’en offrait presque l’occasion. Mais la réalité me rattrapait. J’étais un lycan. Avec une capacité de régénération largement supérieure à la moyenne. Et si jamais cette voiture me touchait, je n’allais peut être pas – voir même surement pas – mourir. Au final, la voiture qui fonçait sur moi à toute vitesse allait même surement être en plus mauvais état que moi. C’était peut être mieux en fait. Ma mère avait déjà perdu son mari, il ne manquerait plus qu’elle perde aussi une de ses filles, et elle ne s’en remettrait pas. Alexia se rendrait peut être compte de ce que j’étais entrain de vivre… Même si j’en doutais sincèrement. Dans sa bulle à Seattle, elle devait être dans un autre univers, une autre vie. Il est tellement difficile d’avoir conscience de ce qui se passe chez les autres quand on vie à presque quatre cent kilomètres.

Le crissement de pneus sur l’asphalte me parvint dans une sorte de brouillard. Je n’étais même pas certaine de ce que j’entendais. Je voyais toujours les deux lumières se rapprocher, encore et encore, moins vite, mais la collision semblait inéluctable. Pourtant, dans une sorte de miracle, le conducteur réussi à arrêter sa voiture, à moins de cinquante centimètres de moi. C’est alors que mon souffle me revint, difficilement. Je ne m’étais même pas rendue compte qu’il s’était arrêté. Mes jambes tremblaient et d’un moment à l’autre je menaçais de m’effondrer. Pourtant, je me retins, par je ne sais quel espèce de miracle. Mon cœur battait la chamade et menaçait de faire exploser ma cage thoracique à n’importe quel moment. J’avais beau avoir compris que je ne risquais rien, savoir que j’aurais pus mourir me pétrifiait encore. Le temps que je me rende compte qu’il était sortit de sa voiture, il était à côté de moi. Tout me paraissait flou, et mes mains étaient glacées. Il n’y avait pas vraiment de doute à avoir, je venais de me payer une sacrée trouille, la peur de l’année. Je ne pouvais décemment pas parler de peur de ma vie étant donné que je me doutais qu’il se passerait d’autres choses bien plus effrayantes dans ma vie, surtout depuis que j’avais pris conscience de l’existence des vampires, des lycans et autres créatures étranges et censées être sorties de mythes et de contes millénaires… Tout est possible en ce monde.

Le jeune homme, qui ne devait pas être beaucoup plus âgé que moi, était sorti de sa voiture et se tenait maintenant à côté de moi, me bombardant de questions :

-Rien de casser ? Je suis désolé, j'aurais dû faire... attention ?

Mes lèvres tremblaient et j’étais encore incapable de dire quoi que ce soit. Je n’arrivais même pas à le regarder, les yeux encore fixés sur le capot de la voiture.

-Vous n'avez pas l'air bien... je peux vous aider ? Je suis vraiment désolé.

J’essayais d’ouvrir les lèvres pour formuler une réponse plus ou moins cohérente, et c’est d’une voix blanche que je réussis à articuler :

-Je… non… ça va… je vais bien…

Enfin, je crois. Un coup de klaxon retentit derrière la voiture, et le conducteur qui suivait semblait pressé.

-Vous… vous devriez y aller.

Je me détournais pour le laisser retourner à sa voiture. Un pas… deux pas… la tête se mit à me tourner, et je ne pus même pas compter le troisième pas que ce fut le noir, et je ne me sentis même pas tomber.