Le temps est quelque chose de tellement précieux qu'il en devient incontrôlable. Frustration, stress, retard, ennui, sommeil... Le temps doute la chose la plus importante, celle qui contrôle notre vie de A à Z. On en manque, on en a trop. Complexe et si présent.
Je crois que l'on se rend réellement compte de sa présence lorsqu'on perd quelqu'un de cher ou que l'on assiste à cet accident. En tous cas, c'est ce que j'ai ressentis pendant un mois entier. Alors que je venais de retrouver Morgan et de démarrer avec lui une relation stable et si agréable, alors que ma vie recommençait à tourner normalement, mon portable avait retentit et j'avais dû prendre le premier vole pour Paris. Ma mère venait d'avoir un accident cardiaque et s'en était sortit de justesse. Faible, fatiguée, et nécessitant des soins intensifs, elle avait besoin de ma présence, de la compagnie de sa fille. Le voyage était passé en une vitesse incroyable, comme si j'avais été projeté dans le temps en avance rapide. Enfin à son chevet, je fus étonné de la voir dans cet état.
Crise cardiaque. C'est étonnant de constater que nos vies sont si fragiles, si éphémères. C'est frustrant d'observer comment une personne si courageuse, incarnant la joie de vivre, peut être décimée et complétement changée d'un coup.

J'étais rentrée avec elle quatre jours auparavant. Très faible, elle avait besoin de ma présence continuellement pour lui tenir compagnie et pour d'autres tâches. J'avais obtenue trois semaines de congés au magasin, et une infirmière venait tous les après-midi pour me soulager trois à quatre heures.
Mais ce qui m'inquiète le plus, c'est ma vie amoureuse. Avec Morgan, nous avions fait tout notre possible pour rattraper les 8 longs mois de mon absence, et donc se voir le plus possible. Malheureusement, c'est ce moment là que ma mère a "choisit" pour me faire quitter un mois encore, l'homme de ma vie. J'avais d'un côté, celui que j'aimais le plus au monde qui m'incitait à partir la rejoindre mais qui me semblait si triste de me voir partir à nouveau, et de l'autre, celle à qui je dois tout qui me conseillais de rester profiter de Morgan mais qui avait tellement besoin d'aide. Maintenant, je me sens idiote, incapable, et j'ai l'impression d'avoir trahit Morgan.

Marchant doucement vers notre lieu de rendez-vous, mes pieds nus dans le sable et ma queue de cheval au vent, ma hâte de le retrouver grandit avec chacun de mes pas. Dès mon réveil, chaque matin, la seule chose qui me faisait tenir était l'espoir de passer ne serais-ce que 2 heures avec lui. Depuis mon retour, je m'efforçais de me sauver les après-midi, car pour rien au monde je ne louperais aucun de ces moments. Aujourd'hui, je pouvais passer toute l'après-midi avec lui.
Le temps était maussade, d'où mon jeans. Les nuages gris avaient envahis le ciel, empêchant les rayons du soleil de passer. Un vent frais soufflait, mais pas encore assez fort pour les faire déguerpir.
A une trentaine de mètres, je l'aperçus, assis par terre, au même endroit exactement que le jour où j'avais appris qui il était vraiment. Un sourire, aux lèvres, je m'approchais à petite course.

-Salut, soufflais-je en arrivant près de lui, un éclat pétillant dans les yeux.

Un profond malaise. Voilà ce que j'éprouvais depuis plusieurs semaines vis-à-vis d'Ashley. Je ne savais pas par quel bout la prendre, hésitant entre faire semblant pendant son absence ou laisser traîner la nouvelle en semant quelques indices que la jeune femme ne semblait pas avoir saisis ; puisque c'était finalement le comportement que j'avais adopté. En même temps, à quoi est-ce que je m'étais attendu ? Nous venions de nous mettre en couple, enfin, alors que nous nous tournions autour comme des oiseaux depuis un an, il aurait été très défaitiste de s'imaginer que quelque chose ne tournait pas rond et que je voulais déjà la quitter. Pourtant, c'était le cas. Enfin, que je voulais la quitter, facile à dire... Je ne le souhaitais pas honnêtement, j'étais bien avec elle et je l'aimais. Mais je devais accepter les faits, je devais me faire une raison, nous n'étions pas faits pour être ensemble, Ashley n'était pas faite pour devenir un lycan et je ne pouvais tenir un rôle d'humain plus longtemps. Ashley était humaine, j'étais un lycanthrope... et il était temps qu'elle me voit comme tel.


Cela faisait des semaines que je réfléchissais aux phrases que j'allais lui dire, évitant de lui parler trop longtemps et prétextant sans arrêt avoir du travail tout en m'excusant d'être aussi peu disponible. J'étais distant, sans trop l'être ; mais apparemment j'avais mal dosé mon comportement et je ne m'étais pas suffisamment écarté d'Ashley puisque mon manque de disponibilité ne lui avait pas mis la puce à l'oreille. En fait, elle n'avait fait que se tracasser sur ce que je pouvais bien faire pour que cela me prenne tant de temps. Cela faisait désormais quatre jours qu'elle était de retour à Forks, mais son retour avait été mouvementé, avec sa mère malade, et j'avais d'autres responsabilités en parallèle. Nous n'avions pu nous fixer un rendez-vous que pour aujourd'hui, priant chacun de notre côté pour que rien ne vienne imposer un contre-temps ; elle, parce qu'elle n'aspirait qu'à me revoir depuis la dernière fois qu'elle m'avait vu, et moi, parce que je souhaitais en finir une bonne fois pour toute, couper les ponts et cesser de me torturer quant à ma relation avec elle. J'allais sentir son parfum pour la dernière fois... je n'allais plus la toucher, ni la serrer contre moi, ni même jouer une ultime fois avec une mèche de ses beaux cheveux. Tout cela m'était désormais interdit, je devais l'oublier et laisser un autre profiter de sa chaleur et de l'amour qu'elle avait à offrir, même si l'idée qu'elle puisse m'oublier et qu'un autre homme puisse la toucher me donnait la nausée. Je l'aimais, après tout.


J'étais assis sur la plage, les genoux légèrement repliés et mes poignets reposant sur ces derniers, les doigts joints. Je fixai l'horizon, observant l'eau s'agiter en de petites vagues et venant mourir à tout juste un mètre de moi. Le vent soufflait dans mes cheveux, me forçant parfois à fermer les yeux pour éviter que de malheureux grains de sable s'y retrouvent coincés. J'attendais, tâchant de vider mon esprit devant cette étendue d'eau comme j'avais voulu le faire une semaine auparavant en étranglant ce pauvre humain, au même endroit. Il ne fallut pas énormément de temps pour que le vent m'apporte une odeur qui m'était familière, un parfum délicieux qui me fit automatiquement fermer les yeux. Je savourai un instant cette douceur senteur qui m'enivrait, même si elle était encore faible, signe qu'Ashley n'était pas encore toute proche. Je me mordis la langue en rouvrant les yeux, sentant mon cœur s'affolait dans ma poitrine, tambourinant contre mon thorax et me hurlant qu'il était encore tant d'adopter un autre comportement, de la serrer contre moi et lui dire qu'elle m'avait manqué. J'eus tôt fait de bâillonner ce médisant, arborant un air calme et posé alors qu'à l'intérieur, je brûlais. Le parfum de la jeune femme se fit de plus en plus présent, de plus en plus fort. Que devais-je lui dire ? Devais-je lui expliquer la situation telle qu'elle était ou omettre tous les détails ? Devais-je tenter de la quitter en douceur, ou passer pour le connard de service pour qu'elle ne me cherche plus ? La connaissais Ashley, je la savais têtue et elle voudrait certainement comprendre, sauf si j'étais méchant. Il semblait qu'elle ne me laisse pas le choix...


Je finis par me relever, fourrant les mains dans les poches de mon jean et tournant la tête vers la belle asiatique, observant ses traits et marquant un temps d'arrêt en apercevant le plaisir qui faisait briller ses yeux par le simple fait de me revoir. J'en eus un pincement au cœur, tandis que sa voix s'élevait dans l'air et qu'elle ralentissait le pas, arrivant à ma hauteur.


« Salut... »


Je détournai les yeux, silencieux et antipathique afin de préparer Ashley à ce qu'elle allait entendre. J'étais froid, imperturbable, imperméable, hermétique à tout ce que je pouvais ressentir et ce qu'Ashley pouvait me dire. Je venais de revêtir mon manteau d'Eclipsien, celui de l'homme qui refuse de se laisser guider par ses sentiments, qui accepte de faire des sacrifices et se plier en quatre pour le bien de sa famille. Ma meute passait avant tout, avant même mon cœur et avant même Ashley. Je baissai légèrement les yeux vers les vagues qui venaient mourir sur le sable avant d'enfin prendre la parole.


« J'espérais que la distance que j'ai mise entre nous ce dernier mois éveille tes soupçons mais ça a foiré apparemment. »


Je tournai la tête vers elle, plantant mon regard dans le sien. J'avais le sentiment de manquer d'air et pourtant je devais continuer. Je devais être brutal dans mes mots, après tout quand on déteste quelqu'un c'est la personne qu'on évite le plus. Plus Ashley m'éviterait, mieux ce serait.


« Je n'étais pas plus occupé que d'habitude, je n'avais simplement pas envie de te parler, et je n'en ai pas plus envie aujourd'hui. J'ai pris beaucoup de temps pour réfléchir tu sais. Nous avons fait une erreur Ashley, une erreur monumentale. »

-Quoi?!

Dès que j'étais arrivée à sa hauteur, je su que ça n'allait pas. Je su qu'il y avait quelque chose d'anormal. Il ne m'avait pas regardé. Il ne m'avait pas souris. Il n'avait pas parlé. Détournant le regard, il restait froid comme de la glace alors que je le regardais, attendant qu'il se passe quelque chose. Ce n'était pas mon Morgan. Je ne le connaissais pas. Je ne l'avais jamais rencontré. Ce n'était pas celui que j'aimais. Ce n'était plus Morgan.
Lâchement, il fixait les remous de l'océan déchainé au lieu de me regarder en face. Et il ouvrit la bouche pour lancer une phrase qui m'acheva, alors que je pensais être forte et pouvoir tenir bien plus que ça.

« J'espérais que la distance que j'ai mise entre nous ce dernier mois éveille tes soupçons mais ça a foiré apparemment. »

Je sursautais, ne m'attendant pas à ça. Moi, je voulais simplement passer un bon moment ici, dans ce lieu qui m'étais si cher étant donné que c'était ici que la vérité avait surgit. Une distance? Quelle distance? La culpabilité m'assiégea; je n'avais pas réussi à être assez présente dans notre couple pour comprendre qu'il voulait s'éloigner, qu'il faisait tout pour s'éloigner.
Je pense que jusqu'à ce qu'il plante son regard dans le mien, je ne m'étais pas rendue compte de l'ampleur de ses mots. Au fond de ses pupilles brillait un tel éclat de rage que j'en fut effrayé, et reculais d'un pas.

« Je n'étais pas plus occupé que d'habitude, je n'avais simplement pas envie de te parler, et je n'en ai pas plus envie aujourd'hui. J'ai pris beaucoup de temps pour réfléchir tu sais. Nous avons fait une erreur Ashley, une erreur monumentale. »

-Quoi?!

C'est la seule et unique chose qui pu franchir la barrière de mes lèvres. Un simple murmure. J'avais chaud. J'avais froid. Je grelottais. Je transpirais. Ma respiration s'accélérait. Je me sentais mal, vraiment mal.
Je n'y comprenais rien. Notre relation avait pourtant si bien commencée, tout semblait si parfait, à part bien sûr l'accident de ma mère. Et là, il était si brutal, si méchant. Je n'en revenais pas. Sans pouvoir détourner les yeux, je ne savais pas quoi dire. Je le fixais, et c'est tout. Mais au fur et à mesure que les secondes passaient, je suffoquais. Il fallait que je dise quelque chose.

-Morgan, non, s'il te plait, tu peux pas dire ça. Qu'est-ce qu'il se passe. Qu'est-ce qu'il ne va pas ?
Pathétique, peut-être, mais je tenais à lui plus que tout. Et il fallait qu'il le sache d'une manière ou d'une autre.

Les yeux d'Ashley trahissaient tous les sentiments qu'elle ressentait en cet instant. Il me suffisait de la regarder pour savoir ce qu'elle pensait et cette sensation qui lui tordait le ventre, lui compressait les poumons. Je ne réagis pas bien que mon cœur s'affola un court instant, sensible à la douleur et à la souffrance de la jeune femme pour qui il battait. Je ne pouvais pas me le permettre, lui montrer que je l'aimais encore, cela n'apporterait rien de bon , ni pour elle, ni pour moi. Et quelle serait sa souffrance si je lui disais de rayer sa vie pour en démarrer une nouvelle ? Oublier tous ses amis, oublier sa mère ? Si, en gros, je lui demandais d'oublier celle qu'elle était pour en devenir une autre à mes côtés ? Je n'avais pas le droit et je ne me le permettrais pas.


« Morgan, non, s'il te plait, tu peux pas dire ça. Qu'est-ce qu'il se passe. Qu'est-ce qu'il ne va pas ? »


Je la dévisageai un moment avant de me tourner complètement vers elle. Elle souffrait, je n'aimais pas ça mais je me disais qu'au moins ce ne serait que passager, elle finirait par flirter avec un autre et m'oublierait. C'est comme ça que se passent les ruptures après tout.


« Tout va bien Ashley, en tout cas de mon côté. Tu dois m'oublier, tout simplement, parce qu'on ne se reverra plus. Tu ne m'aimes pas, en fait tu ne me connais même pas. »


Je marquai une pause, l'air toujours aussi imperméable. Je pensais à Fenris, Lucie, Juliet, Kaitlyn et les autres... Je ne devais pas me dégonfler, pour Eclipse, je n'avais pas le droit.


« Je ne suis plus un être humain depuis des années et il est tant que je cesse d'agir comme tel. Tu es de la bouffe. Les humains, je me les fais en brochette et je les mange autour d'un feu de camp avec le reste de ma meute. Et puis, je suis en guerre. Je n'ai franchement pas le temps de fricoter avec de la bouffe, il est temps que tu te fasses une raison et que tu reprennes ton train-train habituel de petite humaine célibataire, nous n'appartenons pas au même monde. »

Une rupture. Était-ce vraiment ça? Morgan était-il véritablement entrain de me plaquer? Non. Impossible. Ça ne pouvait pas être ça. C'était une mauvaise blague, sans aucun doute. Une très très mauvaise blague, mais un blague de toutes façons. Il était comme ça, il aimait bien me taquiner, me faire peur. Oui oui, ça ne peut être que ça.
Son regard posé sur moi devenait insoutenable. Pourtant, je n'arrivais pas à m'en détacher, de peur que ce soit la dernière fois. Et même si je faisais tout pour me convaincre que Morgan avait répété toute l'après-midi pour être crédible et de ne pas éclater de rire au beau milieu d'une phrase aussi fausse qu'un diamant en verre, je tremblais. Tout mon corps tremblait, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur.

Il se tourna alors complètement vers moi, le regard toujours planté sur moi, déversant une lueur brutale et sans pitié. J'avais beau chercher, je ne trouvais pas cette petite parcelle qui m'aurait permise de croire à mon mensonge, d'être persuadée qu'il m'aimait encore.

« Tout va bien Ashley, en tout cas de mon côté. Tu dois m'oublier, tout simplement, parce qu'on ne se reverra plus. Tu ne m'aimes pas, en fait tu ne me connais même pas. »

Ma bouche s'ouvrit sans que rien n'en sorte. Comment pouvait-il penser une chose pareil? Depuis était-il arrivé à une telle conclusion? Que s'était-il passé dans sa vie pour qu'il puisse ne serait-que brièvement penser que je ne l'aimais pas, que je pourrais l'oublier, ou tout simplement que son image puisse déserter mon esprit?!
Je voulais parler, je voulais lui crier que je l'aimais bien plus qu'il ne pouvais l'imaginer. Je voulais lui hurler que moi, j'avais fait tout mon possible pour nous, que j'étais passée outre son "statut spécial", que j'avais appris à ne pas m'en faire de ces virées nocturnes où plusieurs personnes tombaient entre ses dents. J'avais fait tout mon possible pour qu'entre nous, aucun obstacle ne s'interpose. Alors oui, j'étais peut-être partie à Paris pendant 8 mois, mais j'étais revenue, et j'avais juré que jamais, que plus jamais, je ne pourrais vivre sans lui.
Sauf que je ne pu pas dire tout ça, car il n'en avait pas finit avec ma torture.

« Je ne suis plus un être humain depuis des années et il est tant que je cesse d'agir comme tel. Tu es de la bouffe. Les humains, je me les fais en brochette et je les mange autour d'un feu de camp avec le reste de ma meute. Et puis, je suis en guerre. Je n'ai franchement pas le temps de fricoter avec de la bouffe, il est temps que tu te fasses une raison et que tu reprennes ton train-train habituel de petite humaine célibataire, nous n'appartenons pas au même monde. »

Non. Non, il n'avait pas dit ça. C'était tout bonnement impossible que Morgan, que celui que j'aime plus que tout puisse me lancer ce genre de mots à la figure. Cette expression sur son visage, ce ton hautain de sa voix, ses mots cinglants sortant de sa bouche... Non. Je ne pouvais pas le croire.
J'avais mal à la tête. J'avais mal au ventre. J'avais mal partout. Des courbatures m'enchainaient et ma tête me tournait dans tous les sens. Comment réagir? Comment réagir alors que celui que vous imaginiez être l'homme de votre vie vient de vous assimiler à de la "bouffe", à des "brochette". Mais c'est surtout sa dernière phrase qui m'avait fait tiquer. Elle me dégoutait tellement que tout d'un coup, je ne pouvais ne pas réagir. Me plaquer, c'est une chose. Je l'accepte de toutes les façons possibles et imaginables, à une seule et unique condition: que ce soit fait un minimum gentiment.

-Dit moi pas que t'as dit ça..

Je baissais la tête, prenant mon front entre mes doigts et massant mes tempes. Je suis pas une grande nerveuse, qui part au quart de tour à chaque remarque. Je peux très bien passer sans rien dire devant un clodo qui me hurlerait dessus comme quoi je suis une grosse pétasse radine et tout le toutim. Mais lorsqu'il s'agit de personne qui me sont, ou en l'occurrence qui m'étaient, chères, je ne peux pas me retenir. J'accorde ma confiance assez facilement, mais lorsqu'on en abuse, je le supporte mal.

-T'abuses, Morgan. T'abuses. Je sais vraiment pas ce qu'il s'est passé, t'as peut-être eu une super mauvaise journée, tu t'es disputé avec je ne sais qui, ou je ne sais quoi d'autre, mais sincèrement, ça devient insupportable ton truc, là.

Je relevais lentement les yeux vers lui, croisant les bras, et fixant ses iris vertes. Je me retenais de ne pas piquer ma crise, de ne pas lui hurler dessus, de ne pas le traiter de tous les noms possibles et imaginables. Je recherchais du respect, alors autant montrer l'exemple.

-J'ai dû zapper un bout de l'histoire. T'as pas le temps de fricoter avec la bouffe? En passant, moi c'est plutôt en nems qu'il faut me manger, pas en brochettes. Et de ce que je sais, jusqu'à maintenant, tout allait bien. Enfin de mon côté, en tous cas. J'ai pas vraiment eu l'impression que tu te sois retenu de me sauter dessus crocs en avant, que tu salivais à chaque fois que l'on se voyait... Après tout, on sort ensemble depuis presque 2 mois, mais on a vécu énormément de moments ensemble avant ça.

J'étais du genre curieuse. Je ne lâchais pas facilement les choses qui me paraissaient anormales, bizarres, sans intérêts. Et là, je ne voyais pas du tout pourquoi il fallait en finir maintenant.

Je me tus, observant Ashley d'un air neutre. Mes mots l'avaient blessée, c'était une évidence, et de la peur elle était passée à une colère froide qu'elle peinait à retenir. Je ne dis rien, ne fis pas non plus le moindre commentaire. J'attendais. J'avais dit ce que j'avais à dire et je savais qu'Ashley ne resterait pas sans rien dire face à ce qui avait tout d'une injustice. Après tout nous étions heureux, pourquoi fallait-il que tout s'arrête ? Parce que c'était ainsi, nous étions trop différents pour pouvoir suivre le même chemin ; il fallait bien que cela diverge un jour, et le plus tôt serait le mieux pour que la rupture ne soit pas trop douloureuse.


« Dit moi pas que t'as dit ça.. »


La jeune femme marqua une pause, se prenant la tête d'une main et semblant réfléchir ; à ses mots, sans doute. Peut-être préférait-elle ne pas trop se laisser aller, par peur de dire des choses qu'elle pourrait regretter par la suite. Je n'étais pas tendre dans la rupture et j'en avais conscience, elle pouvait bien s'énerver si elle le souhaitait, c'était son droit. C'était peut-être même la dernière fois qu'elle aurait l'occasion de s'énerver sur moi, il serait peut-être préférable qu'elle n'explose maintenant avant d'imploser quand il serait trop tard ?


« T'abuses, Morgan. T'abuses. Je sais vraiment pas ce qu'il s'est passé, t'as peut-être eu une super mauvaise journée, tu t'es disputé avec je ne sais qui, ou je ne sais quoi d'autre, mais sincèrement, ça devient insupportable ton truc, là. »


J'arquai un sourcil. Pensait-elle vraiment que je n'étais pas sérieux dans mes mots ? Que je n'avais pas conscience de ce que je disais ? Evidemment j'étais blessant, évidemment je lui manquais de respect mais c'était voulu, inutile qu'elle me fasse la morale..... Mais la jeune femme semblait avoir besoin de parler, de me dire le fond de sa pensée.


« J'ai dû zapper un bout de l'histoire. T'as pas le temps de fricoter avec la bouffe? En passant, moi c'est plutôt en nems qu'il faut me manger, pas en brochettes. Et de ce que je sais, jusqu'à maintenant, tout allait bien. Enfin de mon côté, en tous cas. J'ai pas vraiment eu l'impression que tu te sois retenu de me sauter dessus crocs en avant, que tu salivais à chaque fois que l'on se voyait... Après tout, on sort ensemble depuis presque 2 mois, mais on a vécu énormément de moments ensemble avant ça. »


Je la fixai encore quelques secondes, réfléchissant, avant de détourner à nouveau le regard. J'aurais du me douter que tout paraîtrait flou pour elle, qu'elle ne comprendrait pas. Je pensais qu'en étant méchant, elle ne chercherait pas à comprendre, se dirait juste que j'étais un connard se cherchant une excuse bidon parce qu'il était allé voir ailleurs. Je fronçai légèrement les sourcils en fixant l'horizon avant de reporter mon attention sur Ashley, me tournant complètement vers elle.


« Tu ne comprends rien, Ashley. Il ne s'est rien passé de particulier pour expliquer cette rupture, j'ai simplement profité du temps où tu étais en France pour réfléchir davantage à nous et en arriver à la conclusion que c'était pas sérieux. »


Je marquai un silence, sondant les yeux de la jeune femme.


« Tu es un boulet. Pas dans le sens où tu es idiote. Mais tu me rends faible, tu es une cible facile, vulnérable et insouciante. Tu es une humaine, je suis second de meute ; j'ai des responsabilités auxquelles je ne peux pas déroger. Je bouffe des êtres humains, tu bouffes des vaches, chacun son truc. Je serai éternellement jeune, tu vieilliras et tu finiras pas mourir de vieillesse. Tu la vois, la différence ? »


Je soutins un moment son regard avant d'enfin me tourner une nouvelle fois vers la mer qui commençait à s'agiter, secouée par les rafales de vent incessantes. Il ne tarderait pas à pleuvoir, les nuages s'entassaient au-dessus de nos têtes et plus ils s'approchaient, plus l'obscurité se faisait sur Forks et la Push.


« Je suis en guerre. J'ai décidé de me concentrer pleinement à mes obligations en tirant un trait sur ma futile et inutile vie d'humain. Tu en fais partie. »

Le plus horrible dans l'histoire, c'est qu'il ne semblait même pas me prêter plus attention que ça. Comme si je n'étais qu'une idiote qui ne comprenait rien à la vie, et qui de toute façon, ne comprendrait jamais rien. Comme si j'étais trop jeune pour me rendre compte un seul instant de ce qui était entrain de se passer. Pourtant, je n'étais pas sotte. Je savais pertinemment que notre relation venait de prendre fin dès les premiers mots qui étaient sortis de sa bouche. Je savais pertinemment que plus jamais je n'aurais à le voir, que plus jamais je ne pourrais me blottir dans ses bras, que plus jamais je ne pourrais l'embrasser. Mais je gardais une lueur d'espoir, une petite étincelle qui fait que peut-être il m'aimait encore.

« Tu ne comprends rien, Ashley. Il ne s'est rien passé de particulier pour expliquer cette rupture, j'ai simplement profité du temps où tu étais en France pour réfléchir davantage à nous et en arriver à la conclusion que c'était pas sérieux. »

Son regard me brûlait, comme si j'étais passée aux rayons X, et que je ne pouvais plus m'en échapper. Moi aussi, je ne cessai de détailler le moindre trait de son visage. De toute façon, il m'était impossible de décrocher mon regard. J'avais trop peur qu'en clignant des yeux, comme emporté par le vent qui se déchainait de plus en plus, il disparaisse à jamais.

« Tu es un boulet. Pas dans le sens où tu es idiote. Mais tu me rends faible, tu es une cible facile, vulnérable et insouciante. Tu es une humaine, je suis second de meute ; j'ai des responsabilités auxquelles je ne peux pas déroger. Je bouffe des êtres humains, tu bouffes des vaches, chacun son truc. Je serai éternellement jeune, tu vieilliras et tu finiras pas mourir de vieillesse. Tu la vois, la différence ? »

J'attendais qu'il finisse. J'attendais le dernier mot. J'attendais la suite, mais rien ne vint, alors qu'il dirigea son regard vers le loin. Je ne pouvais me résoudre à prononcer le moindre mot, trop fière peut-être pour oser m'excuser, lui jurer que je ferais tout ce qu'il veux pour que ça continue, ou peut-être encore trop secouée par la nouvelle pour qu'un son sorte de ma bouche.
Sincèrement, j'avais peur de la suite. Sincèrement, je redoutais la fin de cette entrevue. Je redoutais de m'effondrer devant lui, de pleurer comme jamais je n'avais pleuré. Peut-être que notre discussion à mon retour des 8 longs mois d'absence n'aurait pas dû avoir lieu. Peut-être que ça aurait été mieux pour nous de tout arrêter avant que ça ne commence. J'aurais dû m'apercevoir que trop de choses nous éloignais l'un de l'autre, que le destin ne cessait de vouloir nous séparer. J'aurais dû voir tout ça, mais comme une imbécile, j'avais pris les choses en mains, j'avais voulut me lancer dans cette aventure. J'avais écouté mon cœur, qui m'avait perdue.

« Je suis en guerre. J'ai décidé de me concentrer pleinement à mes obligations en tirant un trait sur ma futile et inutile vie d'humain. Tu en fais partie. »

Comment devrais-je prendre cette affirmation? Me classe-t-il dans la catégorie "futile", "humaine", "inutile", ou carrément les 3? Il avait décidé de faire ressortir sa méchanceté, il avait décidé de me dégouter. Bravo.

-Futile et inutile.

J'avais les nerfs en boule. Aucune larme. Je ne le supplierais pas. Il trouvera une Ashley métamorphosée. Il était différent? Je l'étais aussi. On dit que les épreuves les plus dures affermissent l'esprit. C'est totalement vrai.

-Eh ben c'est cool, vas-y. Par faire ta putain de guerre en mettant de côté le reste. Vas-y, c'est pas moi qui te retiendrais.

Je levais les yeux au ciel, attendant je ne sait quoi pour continuer. Mes mots, sans doute. J'avais certes envie de lui dire que je l'aimais, mais d'un autre côté, je voulais lui hurler dessus, lui hurler que sans lui, je me sentirais beaucoup mieux. Il voulait me faire souffrir, ça marchait magnifiquement bien.

-Si tu ne voulais plus de moi, si tu voulais me quitter, il suffisait de le faire simplement. C'était pas la peine d'être aussi ... aussi désagréable, et de te monter la tête pour ça. C'est finit? Ok.

La réaction d'Ashley ne se fit pas attendre. La jeune femme répéta mes mots avec une amertume que même le plus doué des comédiens ne saurait imiter. Je ne reposai pourtant pas les yeux sur elle, fixant encore et toujours l'horizon où se mariaient ciel et mer. Moins de dix secondes s'écoulèrent avant qu'Ashley ne reprenne la parole, ravalant sa colère et prenant le soin de ne pas élever la voix ; sans doute se disait-elle que cela me ferait trop plaisir, peut-être avait-elle raison. Je savais que lorsqu'elle haussait le ton, c'était qu'on l'avait vraiment blessée, et comme c'était mon but actuel... J'avais un goût amer sur les lèvres de la voir se retenir autant de me crier dessus.


« Eh ben c'est cool, vas-y. Par faire ta putain de guerre en mettant de côté le reste. Vas-y, c'est pas moi qui te retiendrais. »


Un léger sourire se dessina sur mes lèvres. Ce n'était pas elle qui me retiendrait ? Bien sûr que non, certainement pas après tout ce que je venais de lui dire ; et puis, elle savait sûrement au plus profond d'elle que même sans que je l'ai quittée elle n'aurait jamais pu m'empêcher d'aller me battre pour ce qui me tenait à coeur. Je relevai les yeux vers elle.


« Si tu ne voulais plus de moi, si tu voulais me quitter, il suffisait de le faire simplement. C'était pas la peine d'être aussi ... aussi désagréable, et de te monter la tête pour ça. C'est finit? Ok. »


Je la fixai un instant, effaçant le sourire qui avait orné mes lèvres jusque là.


« Ça aurait été trop simple. Je tenais à te dire pourquoi je te quittais, même si c'est difficile à attendre. Notre relation avait toujours été basée sur la sincérité, alors, pourquoi changer ? Et puis, je tenais à te dire ce que j'avais sur le coeur. Après tout c'est la dernière fois qu'on se voit toi et moi. »


Je hochais la tête à mes paroles, détournant à nouveau les yeux.


« Je pense qu'on en a fini maintenant. »


Là-dessus je tournai les talons, commençant à m'éloigner... avant de m'arrêter. Je fixai le sol un moment, me mordillant la lèvre inférieure avant de relever la tête vers Ashley.


« Je souhaite malgré tout un bon rétablissement à ta mère. »


Usant de la vitesse des lycanthropes pour ne pas laisser l'occasion à Ashley de me dire quoique ce soit, je disparus de la plage, courant simplement vers un point flou. Tout ce qui m'importait, c'était que c'était terminé. J'avais exécuté les ordres de Fenris, je m'en étais sorti et c'était tout ce qui comptait, non ?

Il me fixait de son regard perçant, sans que je puisse détacher mon regard du plus profond de ses pupilles. J'attendais une réponse. N'importe laquelle. De toutes façons, il m'avait blessé bien trop profondément pour que je puisse lui pardonner. La plaie était bien trop béante pour que nous puissions nous remettre ensemble en oubliant tout ça. Il n'y avait plus de retour possible. Je n'étais plus la même. Et je ne la serais plus jamais.

« Ça aurait été trop simple. Je tenais à te dire pourquoi je te quittais, même si c'est difficile à attendre. Notre relation avait toujours été basée sur la sincérité, alors, pourquoi changer ? Et puis, je tenais à te dire ce que j'avais sur le coeur. Après tout c'est la dernière fois qu'on se voit toi et moi. »

Son regard m'échappa. Je pinçais mes lèvres. Je ne pleurerez pas cette fois. Je ne pleurerez plus jamais.

« Je pense qu'on en a fini maintenant. »

On en a finit? Je n'en ai pas finit du tout! Je ne veux pas que ça s'arrête là! Je ne veux pas lui laisser le choix de notre fin! Je ne veux plus en parler, mais je ne veux pas qu'il parte!
Sans pouvoir bouger, sans pouvoir ouvrir la bouche, et sans pouvoir cligner des yeux, je le regardais se lever. Il fallait que je le retienne. Je voulais le voir encore et encore. ça ne devait pas être la dernière fois. Il fallait qu'il sache que malgré tout, je l'aimais.
Non. Je ne l'aimais plus. Il fallait qu'il s'en aille le plus vite possible. Je ne voulais plus le voir. Je ne voulais plus l'entendre. Je ne supportais plus la simple vision de ses yeux émeraude posés dur mon visage. Je ne pouvais plus le voir se mordiller la lèvre. Ce tic qui m'avait semblait si mignon me dégoutait à présent.

« Je souhaite malgré tout un bon rétablissement à ta mère. »

J'étais estomaquée. Il s'enfuit sans me laisser le temps de prononcer le moindre mot. Il était partit. Je ne le verrais plus jamais. Plus jamais. Mon coeur se sera, alors que je plongeais mes yeux dans l'immensité de l'océan. Mes yeux ne faisaient qu'un avec l'eau salé, comme si j'étais entrain de m'y noyer. C'était finit. Je n'avais même pas la force de lui courir après, de le rattraper. C'était finit.