Un an. C'est le temps qu'a pris ma vie pour changer radicalement. Un an, pour que mes habitudes soient remplacées par une vie au jour le jour. Un an, pour voir mes certitudes s'effacer peu à peu pour devenir un mélange de réalité et de fiction. Un an que j'ai été totalement bouleversé, du tout au tout. Un an ça peut être très long, ou alors passer à la vitesse d'un éclair. Il y a des jours où j'ai l'impression que la veille encore, j'étais empli de rêves de gloires et me lançais sur ma routine au sol aux championnats du monde. D'autres jours, j'ai le sentiment que ces jours heureux sont à des siècles, à une éternité, de ma vie à Forks. C'est cette impression qui prédomine la plupart du temps. Je n'ai rien pour me rappeler mon passé dans la petite ville pluvieuse. Hormis peut être cette fille, Aubrey, qui ressemble tant à Bleuenn. Mais de toute manière, je n'ai pas le temps à penser au passé. Trop de choses se sont déroulées depuis mon arrivée à Forks pour que ça me vienne à l'esprit. Des vampires et des loups. On aura tout vu. Maintenant, tout ce que je ressens quand je sors dans la rue, c'est la peur. Je scrute chaque visage, tente de détecter quelqu'un avec une peau trop pâle, ou des dents trop pointues. Je cherche des traces de morsures dans le cou des passants. Tout cela m'obsède, et j'ai l'impression de devenir fou.

Mon passé est loin. Tellement loin de ma vie actuelle. Et pourtant il me rattrape.


Je rentrais du boulot. La journée avait été épuisante et ma jambe n'en pouvait plus. J'étais resté debout derrière le bar du café où je travaillais pendant plusieurs heures, et ma jambe était un peu trop fragile pour moi, depuis cette chute aux championnats du monde. Je m'étais habitué au fait de boiter, mais il restait des jours où ma jambe et mon dos me torturaient. C'était un de ces jours.

J'étais pressé de retrouver mon appartement et d'oublier cette journée, ainsi je marchai d'un pas vif dans les rues de Forks, sans cependant pouvoir m'empêcher de lancer des regards aux passants pour détecter une quelconque particularité physique qui ferait penser aux êtres surnaturels habitant la ville.

Je me figeais soudain. J'eu l'impression que mon coeur cessait de battre dans ma poitrine, que mes poumons refusaient de prendre l’oxygène dont ils avaient besoin. J'avais l'impression de revivre ce jour où j'avais vu Aubrey, pensant que c'était Bleuenn. Le hasard ( ou le destin ? ) voulait que ce soit dans cette exacte même rue où j'avais croisé le regard d'Aubrey, que je croisai celui de celle qui avait longtemps été ma meilleure amie. Nemesis. Mais c'était impossible, évidemment. Nemesis était à New York, elle savourait sa victoire, suivait sa routine habituelle. Qu'est ce qu'elle viendrait faire à Forks ? Surement qu'elle n'en connaissait même pas le nom. Non, c'était tout simplement impossible. Alors comment se faisait il que je la voyais, devant mes yeux, à dix mètres à peine ? Une hallucination. Ça ne pouvait rien être d'autre !

Je repris ma respiration, essoufflé par cette apnée forcée. Une sorte de gargouillis sortit de ma gorge avant que je ne réussisse à parler. « Non. Non ! Tu es à New York ! » Bien entendu, c'était ridicule mais la panique m'avait empêché de réfléchir. Et puis, sans laisser le temps à Nemesis de réagir, suivant un instinct que je ne comprenais pas, je m'avançai, bras ouverts pour la prendre dans mes bras. Elle me rappelait de mauvais moments, éveillait ma jalousie, mais Nemesis m'avait manqué.

J'airais dans les rues de Forks depuis déjà trois bonne heures au moins. Marchant d'un pas lent et traînant, dévisageant les passants cherchant un détail qui trahirait leur « nature ». Je devais les gêner mais, ici à Forks, il fallait faire attention à tout le monde. Cette ville était réputé pour la présence de vampire et de loup-garou vivant parmi les gens normaux. A vrai dire, je n'avais pas peur, à présent je ne craignais rien : j'avais changé, je n'étais plus la proie mais plutôt une créature étrange. Il avait fallut quelques minutes à ce loup pour me mordre et détruire ma vie par la même occasion. J'avais alors subit ma première mutation il y a quelques heure à peine. Les sensations que j'avais alors ressentit étaient encore toute fraîche dans mon esprit, d'abord un grand coup de chaleur puis le sentiment de ne plus rien contrôler et enfin, lorsque j'ai repris mes esprit j'étais devenue une énorme boule de poile blanche, mes vêtements étaient en lambeaux sur le sol. Heureusement, personne ne se trouvait dans cette petite rue à ce moment là, je me mis alors à courir vers la forêt afin de me cacher des yeux des passants et c'est avec un grand étonnement que je constatai que j'avançais à une vitesse qu'aucun animal ne pouvait atteindre. Pendant quelques heures je me suis cachée dans cette forêt puis quant enfin, j'ai repris forme humain j'ai constaté que j'étais complètement nue, mes vêtements n'avaient pas survécus à cette transformation. Je dus donc me faufiler nue jusqu'à mon minuscule studio pour enfiler une nouvelle tenue. J'étais nue et je n'avais pas froid au contraire, j'avais même chaud, très chaud. Je faisais certainement de la température. J'avais par bonheur réussi à atteindre mon studio sans que personne ne me voit, il faut dire que les rues de cette stupide ville étaient déserte. J'avais donc enfiler une nouvelle tenue et était ressortie pour prendre l'air en … débardeur. Je n'avais pas froid du tout, au contraire, le vent glaciale me faisait du bien. C'est ainsi que je LE rencontrai. Oui, c'était Barbara, celui qui fut longtemps mon meilleur ami. Nous partagions la même passion, nous nous entraînions ensemble des heures durant et nous entendions merveilleusement bien. Rapidement, une complicité s'était développée entre nous. Puis cet accident pendant les championnats du monde de gymnastique qui l'avait forcé à abandonner tant dis que moi j'avais pu continuer et j'avais d'ailleurs finis deuxième. Suite à ça, notre relation s'était ensuite dégradé et il était parti sans me dire ou il allait, sans même me dire au revoir. Pendant de longs mois, je m'étais renseignée sur lui, et j'avais finis par le retrouver. C'est pour cette raison que j'étais venue dans cette ville, pour comprendre, prendre de ses nouvelles mais c'est également à cause de lui que ma vie avait basculée … Je ne pouvais m'empêcher de lui en vouloir, je cherchais un coupable.

-« Non. Non ! Tu es à New York ! ».

Je me mis à le dévisageai ne comprenant pas une fois de plus sa réaction puis il s'approcha de moi et me prit dans ses bras. Je n'avais pas eut le temps de dire quoi que ce soit. Je ne savais pas comment réagir. Il me serrait contre lui et moi je réfléchissais à ce que j'allais lui dire. Après quelques secondes ainsi, je m'écartai de lui. Les mots me manquèrent. Je ne savais pas quoi lui dire … Je me contentai de le contempler, il n'avait pas tellement changer en un an.

- «Je suis venue ici pour te retrouver, tu ne me donnais plus aucune nouvelle, tu étais partie sans me le dire, dans une ville sois disant remplis de vampire et autres loup-garous, sans le moindre au revoir. J'ai donc quitter New York pour te rejoindre et c'est ici que ma vie bascule … ».

J'étais dégoûtée, détruite. Toute fois, je n'arrivais pas à lui en vouloir totalement pourtant c'était de SA faute.

J'arrivais à peine à y croire : Nemesis était là. Même la sentir entre mes bras ne pouvais me convaincre parfaitement qu'elle était bien à Forks. C'était le chaos dans ma tête. Un mélange d'émotions toutes totalement contradictoires.

J'avais le sentiment qu'avec Nemesis à mes côtés, tout irai toujours bien. Elle avait été ma meilleure ami pendant tant de temps... Des années entières de bonne humeur et d’insouciance à ses côtés. Bien qu'au cours des derniers mois ce n'ai pas été la joie, bien que je soit parti loin de New York, loin de tout ce qui me rappellerai mon ancienne vie, elle restait une personne que j'adorai, et une personne - ce n'est qu'en la tenant enfin dans mes bras après tant de temps séparés que je l'avais réalisé - dont j'avais besoin.

Mais d'un autre côté, j'étais mort de trouille. J'avais travaillé tellement dur pour oublier l'Arthemis de New York, j'avais fait tant d'efforts pour oublier Bleuenn... Nemesis allait tout foutre en l'air, c'était évident. Rien qu'à la tenir dans mes bras, j'avais l'impression de revoir ma vie défiler à toute vitesse, depuis mes premiers débuts dans un gymnase de gymnastique, jusqu'à l'enterrement de Bleuenn. J'avais peur que Nemesis me donne envie de retourner à New York. Si cela arrivait, je ne tiendrai pas le choc, j'en était certain. Je connaissais mes limites, et elle s'arrêtaient au frontières de la grande pomme.

J'avais envie de serrer Nemesis dans mes bras jusqu'à en avoir mal aux muscles, j'avais envie de m’imprégner de son parfum, de la toucher pour être sur qu'elle était bien réelle, et en même temps, j'avais envie de la virer à coups de pieds de mon territoire. J'étais toujours empli de jalousie devant sa vie à l'apparence parfaite quand moi j'étais un sale drogué accro. J'étais en colère pour ses rêves réalisés quand les miens s'étaient brisés en milles morceaux. J'étais furieux parce qu'elle appartenait à mon ancienne vie, et que pourtant j'étais dans tous mes états de la revoir.

J'étais partagé entre tous ces sentiments, incapable de prendre la moindre décision : rejeter Nemesis ou la garder encore contre mon coeur. C'est elle qui finit par faire ce choix à ma place, me repoussant doucement. J'avais les yeux humides, pleins de larmes qui refusaient de couler, tout en étant tout de même présentes. J'avais l'impression que, d'une certaine façon, revoir Nemesis c'était comme rentrer chez soi après avoir fait le tour du monde. Un soulagement comme un regret de voir son périple terminé. C'était exactement ce que je ressentais. Soulagement et regret, joie et peur, amour et colère.

Nemesis m'avait d'abord paru inchangée. Mais c'est en prêtant un peu plus attention à son visage que je me rendis compte que quelque chose n'allait pas. Son regard était différent. Les yeux pétillants et chaleureux que j'avais connu pendant près de vingt ans de grande amitié s'étaient changés pour rendre un regard pâle, froid et distant. Comme si elle était déçue, et amère envers moi.

C'était compréhensible. J'étais partis pendant un an. Un an sans aucune nouvelle, sans même dire où j'étais. Peut être même Nemesis était elle au courant pour Bleuenn. Si elle savait que j'avais poussé une jeune femme perdue au suicide, ma meilleure amie ne me le pardonnerai jamais. Peut être était-ce pour cela qu'elle était venue, après tout : me jeter son mépris et son dégoût au visage.

Alors que j'étais empli d'interrogations, Nemesis me donna une autre source de préoccupation. « Je suis venue ici pour te retrouver, tu ne me donnais plus aucune nouvelle, tu étais parti sans me le dire, dans une ville soi-disant remplis de vampire et autres loup-garous, sans le moindre au revoir. J'ai donc quitté New York pour te rejoindre et c'est ici que ma vie bascule … » Je me doutais bien que Nemesis voulait des explications concernant mon départ, c'était totalement justifié. Mais elle était au courant pour les loups garous et les vampires. Bien sur, l'information s'était répandue partout depuis le désastre du bal de Noel, mais il me semblait que pour croire à toutes ses histoires de créatures surnaturelles, il fallait en avoir rencontré une. J'avais mis un mois depuis mon arrivée à Forks pour croire à ces histoires, et si j'avais admis l'existence des lycans et autres monstre, c'était parce que j'avais moi même été attaqué par une de ces bêtes. A New York, où la ville n'étais remplie de vampires, toutes ces histoires devaient sembler être des balivernes. Mais Nemesis savait. Elle n'en avait aucun doute, vu le ton de sa voix.

Je scrutai encore une fois le visage de Nemesis. Plus ce que de la déception, il y avait gravé dans ces traits un sentiment bien plus effrayant. On aurait presque dit.. de la haine. Jamais elle ne m'avait regardé comme ça en vingt ans. Je pouvais lire ce que je pensais être de la douleur dans ses yeux.

« Alors... tu connais l'existence des loups et des vampires hein ? Ne t'en fais pas, je n'ai pas été mordu par un de ces monstres. Il y en a pas mal à Forks. » J'eu un rictus de dégoût. Je détestai ces horreurs de la nature qui, pour beaucoup, étaient capable de tuer de sang froid. J'avais déjà plus ou moins tué quelqu'un, et j'éprouvais une telle culpabilité que l'idée que quelqu'un ne ressente rien suite à un meurtre me glaçait le sang. Les loups et les vampires n'étaient que des erreurs de la nature qui devaient être éliminés.

Mais quelque chose m'avait perturbé dans la phrase de Nemesis. Il y avait quelque chose que je ne comprenais pas. « Que.. que ta vie bascule ? Que veux tu dire par là ? » Je me plongeai dans les yeux de Nemesis, attendant une réponse.

Ces yeux étaient emplis de larmes, des larmes de joie mais ce n'est pas pour autant qu'il pleurait. Puis il plongea son regard dans le mien. Il dut remarquer que quelque chose n'allait pas car soudainement son expression se modifia et je pu lire sur ce visage que je connaissais par cœur, comme une inquiétude. Il me dévisagea ainsi, tant dis que moi je me perdais dans ce regard. Je me surpris à éprouver de l'amour pour Arthemis. J'étais partagée entre l'amour que j'avais eut pour lui, le fait qu'il m'ait énormément manqué pendant cette année et le fait qu'il ne m'ait absolument rien dit, qu'il ne m'ait même pas donné de nouvelle et surtout je lui en voulais pour cette nouvelle vie qui m'était imposée. Certes je ne pensais pas que ce soit lui qui m'ait mordu, enfin, ici j'ai l'impression qu'on ne peux faire confiance à personne ...

Il me questionna alors sur les vampires et les loups garou et m'assura qu'il n'avait été mordu par aucun d'eux. Lui, il avait eut la chance de ne pas se faire mordre par l'un d'eux. Contrairement à moi ... Les larmes me montèrent aux yeux, je ne pourrais jamais retourner chez moi. A New York, personne ne croyait à ces histoires de vampire et de loups et si on découvrait ce que j'étais devenue on me rejetterait. Je serais considérer comme un monstre. Je ne pourrais jamais retrouver ma vie d'avant et était à présent prisonnière de cette nouvelle vie stupide.

-"Que.. que ta vie bascule ? Que veux tu dire par là ?" demanda t-il.

Ma vue se brouilla et les larmes coulèrent sur mes joues. Je levais les yeux au ciel pour essayer de les stopper mais rien n'y fit. Au bout de quelques secondes je réussis enfin à articuler :

-"Et bien ... Je t'ai chercher pendant un an. J'avais peur pour toi, je craignais qu'il te soit arrivé quelque chose puis j'ai enfin finit par savoir ou tu te trouvais. J'ai prévenu le club que je serais absente pendant quelques jours parce que je partais en voyage. J'ai abandonnée l'entrainement pour toi. J'ai pris un avion puis un taxi et j'ai finit par arriver à Forks. J'avais déjà trouvé un petit studio que je loue en ce moment même et puis je suis tomber sur cette bête immense et répugnante, un loup garou. Je te laisse deviner ce qu'il s'est passé ensuite. Oui, tu as eut la chance de ne jamais te faire mordre. Tant dis que moi je n'ai pas eut ta chance ... A présent ma carrière est fichue jamais je ne pourrais retourner à New York car il me prendrait pour un monstre, JAMAIS ! Je me répugne moi même tellement je trouve cette nouvelle vie repoussante ... J'aimerais pouvoir revenir en arrière, je n'avais rien demandé. Juste de revoir mon meilleur ami et à cause de lui, je me retrouve coincée dans cette minable ville."

Je repris ma respiration. J'avais sortie tous ce que j'avais sur le cœur tant dis que les larmes continuaient à couler le long de mes joues, ruinant ainsi mon maquillage. Je les essuyais au fur et à mesure qu'elles coulaient tout en regardant Arthemis attendant une réaction quelconque. J'avais honte de pleurer ainsi devant lui, j'aurais voulu lui montrer que j'étais forte mais la tristesse, la colère et le regret avaient pris le dessus sur l'amour que j'avais pour celui qui fut longtemps mon meilleur ami et pourtant je tenais encore à lui. Durant le moment où il m'avait pris dans ses bras, je devais avouer que j'avais ressentis comme du bonheur, du bien être et du soulagement. Pendant une seconde, j'avais retrouvé ma joie de vivre d’en temps.

J'étais totalement perdu. Pour une raison que je ne comprenais pas, Nemesis s'était mise à pleurer. Je voyais de grosses larmes rouler sur ses joues, et je n'avais aucune idée de comment réagir. Jamais je n'avais vu la jeune femme pleurer. Du temps où j'étais encore à New York, elle était toujours enjouée, pleine d'énergie. Et même dans les pires moments, jamais elle n'avait versé une larme devant moi. Nemesis était tellement forte... beaucoup plus que moi.

Je sentais mes mains trembler tandis que je cherchais quelque chose à faire. La reprendre dans mes bras ? La laisser gérer ça seule ? Lui murmurer quelques mots de réconfort, bien que je n'aie aucune idée de la raison pour laquelle elle pleurait ? Le rouge me montât aux joues. Je me sentais honteux de ne pas avoir été à ses côté les douze derniers mois. Avant que je n'aie pu prendre une quelconque décision, Nemesis m'expliqua la cause de ses larmes.

Sans parvenir à maîtriser mon instinct, je me reculais d'un pas. C'était tout sauf la bonne chose à faire, mais je n'avais pas pu m'en empêcher. Nemesis. Une louve. Un monstre. Tout comme ce fou de la plage qui avait manqué me tuer pour me prouver que les créatures surnaturelles existaient bel et bien. Tout ce que je détestai et qui me terrifiai, en somme.

Je ne voyais plus Nemesis de la même manière. C'était ridicule, car au fond elle restait la même personne, elle avait juste quelques... capacités en plus. Mais ça faisait trop de chocs d'un seul coup. D'abord la revoir, puis ça. Je m'efforçai de reprendre un visage normal, conscient du rictus qui déformait mes traits. Ne pas l'effrayer, ne pas lui montrer ce que je pensais de sa nouvelle nature. Nemesis avait besoin de soutient, pas de déception suite à mon incompréhension.

Je scrutai le visage de mon amie. Des sillons noirs étaient apparus sur ses joues, son maquillage ayant coulé. Je cherchais - encore une fois - comment réagir. « Tu.. tu est des leurs, maintenant. » Mon ton, sans que je ne puisse m'en empêcher était devenu amer. Je me demandais si le créateur de Nemesis était le loup qui m'avait attaqué sur la plage. Ça ferait une belle coïncidence... « Je ne comprend pas... trois mois que je suis installé à Forks et je n'ai pas croisé tant de loups que ça et toi en trois jours... » Trois mois que j'avais quitté New York, trois mois que Bleuenn était morte par ma faute, trois mois qu'elle était enterrée six pied sous terre à New York. C'était moi qui méritait d'être transformé. Nemesis, qui n'avait jamais fait de mal à personne - à ma connaissance - et qui était là depuis trois jours - ou un peu plus un peu moins, mais ça ne changeait pas grand chose - avait été transformée. C'était totalement injuste. La chance avait tourné. « Je suis désolé. Viens, je t’amène chez moi, tu prendra une bonne douche et on parlera de ça devant une tasse de café brûlant. » Je n'avais aucune envie d'emmener un monstre chez moi, mais j'étais toujours empli d'amitié envers Nemesis et je voulais le lui montrer. « On dirait qu'on est dans le même bateau toi et moi, non ? On a tout perdu. »

Il fit un pas en arrière et étonnamment ça me choqua. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Je vis ses yeux emplis de dégoût tant dis que sa manière de me dire que j'étais à présent « une des leur » ne fit qu'affirmer ce que je pensais : je le dégoûtais, je lui faisais peur. Son comportement ne fit qu'accroître ma colère. Je lui en voulais, tout ça c'était de sa faute. Toute fois, il semblait en même temps … déstabilisée et triste pour moi … Il me proposa de le suivre chez lui pour prendre une douche et parler de tout ça. Pendant un moment j'eus envie d'accepter, j'avais envie de retrouver mon meilleur ami, j'avais besoin de lui.

- « Tu me proposes de venir chez toi alors que tous ça c'est de TA faute ! C'est toi qui est parti sans rien me dire, qui a arrêté de me donner des nouvelles, qui refuser mes appels, qui ignorait mes SMS et maintenant si j'en suis là c'est uniquement de ta faute … Tu m'as manqué, c'est pour toi que je suis venue ici tu le sais ! Je voulais te retrouver, retrouver mon meilleur ami ! Mais peut on encore appeler ça un meilleur ami ? Je ne pense pas ! Un meilleur ami aurait dit à sa meilleure amie pourquoi il ne voulait plus lui adresser la parole et pourquoi il avait choisi de déménager et surtout où il allait or, ce n'est pas du tout ce que tu as fait ... Et ma vie est fichu à cause de toi ! Donc à moins que tu connaisses un moyen de me redonner ma forme originelle, je t'en veux pour tous ces mois de silence, pour ton départ, et surtout pour cette vie qui m'est imposée par TA faute. »

J'avais arrêté de pleurer, et essuyais mes yeux. J'avais toujours été directe et franche avec les gens, ce qui parfois pouvait les blesser. Ma vie était fichue et c'était de sa faute, peut être pas entièrement certes, mais il était tout de même responsable pour moi. Je le regardais de bas en haut, je l'aimais encore, je le savais mais il fallait que je chasse ce stupide sentiment maintenant, que je l'oublie. Ça serait durs, je le savais parfaitement, j'avais mis un an à le retrouver et pour finir par devoir l'oublier mais j'étais sur d'en être capable ! J'avais été capable d'atteindre le championnat international .. mais avec Arthemis .. C'est alors qu'un flash-back m'envahit : je revue nos après midi entière à nous entraîner ensemble à nous corriger à nous entraider, les merveilleux moments que nous passions ensemble. Encore une fois, j'eus envie de me serrer dans ses bras, je me souviens que je m'y sentais bien, en sécurité. J'essayais de chasser ce sentiment de mon esprit, ces sautes d'humeur allaient finir par me rendre folle.

- « On est pas dans la même galère ! Toi au moins tu n'es pas devenue une bête hideuse et incontrôlable ! ».

Soudainement j'eus extrêmement chaud, j'étais en colère et je me rendis compte que je m'étais mise à trembler.

Je jouais mon hypocrite. Jamais cela ne m'étais arrivé avant. J'avais toujours été franc et direct, n'ayant peur des conséquences de certaines vérités. Jamais je n'aurai pensé commencer avec Nemesis. Mais, au fond, c'est logique de mentir à ceux que l'on aime. On ne veut pas les décevoir, on ne veut pas leur faire de mal... « Il n'y a que les ennemis qui se disent la vérité ; les amis et les amants mentent sans cesse, pris au piège dans la toile du devoir. » Et ce n'était que maintenant que je me rendais compte à quel point cette citation de Stephen King était vraie. Je détestais la nature de Nemesis, et pourtant je ne voulais le lui montrer. Je me devais de la soutenir parce qu'au fond, elle était toujours la même personne. Mais je n'en avais pas envie. J'voulais qu'elle repart vivre ailleurs et m'oublie. Outre le fait que ce soit un lycan, elle apportait comme un nuage de poison. Un poison qui me forçait à me rappeler tout ce que j'avais perdu. Nemesis était à présent dans le même cas que moi, mais je ne pouvais me résoudre à la plaindre, et je ne faisais que la mépriser.

Je m'attendais à ce que Nemesis ne voie pas mon hypocrisie, mais elle dû le remarquer, puisque son visage se métamorphosa, déformé par un rictus de colère. Ce que je n'avais pas été capable de montrer à mon amie, celle ci l'affichait clairement : douleur, haine, déception et dégoût.

Nemesis avait raison. Elle avait parfaitement le droit de me détester, je comprenais cela. Mais elle ne semblait même pas essayer de comprendre mes motivations. Elle ne s'était pas mise trois seconde à ma place pour tenter de sentir ce que j'avais ressenti, allonger dans mon lit d'hôpital, un médecin penché sur moi pour m'annoncer que mes rêves étaient fichus. Non, elle, elle avait tout eu, alors pourquoi se mettre à la place du gros loser ? À mon tour, incapable de contrôler un peu plus mes émotions, j'éclatais. « Alors tu ne comprends vraiment pas ? Tu es tellement naïve ! Tu croyais que j'allais être heureux pour ta médaille, t'accompagner dans ton bonheur parfait et dans ta gloire ? Mets toi deux seconde à ma place et tu comprendras ! Mais j'imagine que tu es trop égoïste pour ça, hein ? Regarde moi, regarde moi bien. Je suis un putain de junkie avec une patte folle. Je boite, merde ! Pourquoi je ne répondais pas a tes appels, mails et sms ? Parce que je t'en veux, Nemesis ! Je t'en veux d'avoir tout ce que je n'ai pas ! Ta vie est fichue ? Et la mienne t'en pense quoi ? Je me sens mal, Nemesis. Tous les jours c'est un calvaire de se lever le matin. Et tu sais pourquoi ? Non, évidement que non. Tu n'as perdu que tes rêves. Moi je vis chaque minute, chaque seconde avec la culpabilité d'un mort sur la conscience, alors s'il te plait avant de te plaindre réfléchis à tout ce que j'ai vécu ! » Ma tirade était dénuée de sens, étant donné que Nemesis n'était même pas au courant pour Blue, mais une fois lancé je n’avais pu empêcher les mots de dévaler ma bouche. C'était la première fois que je mettais des mots sur ma culpabilité envers ce que j'avais fait à Bleuenn. Jusqu'ici, je n’avais cessé de tenter de me convaincre que je ne ressentais rien pour son suicide, bien que ce ne soit pas le cas. Mais dans mon état de rage, je n'avais pu stopper ces paroles. Tout comme je ne pu m'empêcher de continuer mon discours. « Et bien sur, c'est de ma faute si tu es là ! Si une seconde tu avais pensé à moi au lieu de jouer à la petite égoïste, tu aurais compris pourquoi je ne veux pas de toi dans ma vie ! Tu l'aurais compris et accepté parce que c'est pour mon bien. Oui, tu as bien entendu, mon BIEN ! Avec toi à mes côtés, je ne fais que de me rappeler des mauvaises choses. Des choses qui me font mal. Des choses que je tente de fuir depuis un an ! Et j'avais presque réussi, merde ! Mais voilà que tu viens foutre tout ça en l'air. Et je ne suis pas celui qui t'a mordu, alors ne m'accuse pas ! Tu es venue de ton plein grès, je ne t'ai forcé à rien. Je t'aurai même empêché de venir si j'avais pu. Et sérieusement, des tonnes de personnes ici seraient heureuse d'avoir ces.. pouvoirs ou je ne sais quoi. Tu as tout, une médaille, des capacités surhumaines ? Comment oses tu te plaindre à quelqu'un qui n'a rien ? Nada. Le néant. A part quelques personnes qui me détestent et un boulot de merde, je n'ai rien. » J'étais illogique. Deux minutes à peine avant, je disais à Nemesis qu'elle avait tout perdu. Mais la vérité c'était que je modifiais mes paroles en fonction de ce qui pourrait lui faire du mal. J'étais triste, alors je me vengeais comme je le pouvais. Pas forcément sur les bonnes personnes, mais c'était toujours bon à prendre.

Je restai ainsi bouche bée. Il avait été blessant, jamais auparavant il ne m'avait parlé comme ça, jamais. Je ne le reconnaissais plus, il avait raison : je n'avais aucunement pensé à lui, pas une seule seconde suite à ma victoire. Une onde de culpabilité m’envahissait alors, je ne me souvenais pas avoir ressenti un jour une pareil émotion. C'était un étrange mélange de plusieurs sentiments en même temps, fort désagréable. Je fis un pas en arrière face à toute la haine et toute la colère qu'il avait déversé sur moi en l'espace de quelques secondes. Il me faudrait certainement beaucoup de temps pour que je digère ce que Arthemis venait de me dire. Mes tremblements n'avaient pas cessé, tant dis que j'avais de plus en plus chaud. Il y eu un long moment silencieux entre nous, l'atmosphère était tendue. J'essayai de me contenir mais cela devenait de plus en plus difficile. Je savais que ça annonçait dans peu de temps, je me changerai en louve.

Je n'en revenais toujours pas de ce que venais de me dire l'homme qui était devant moi. Oui l'homme, ce garçon n'était pas mon meilleur ami, ce n'était pas Arthemis. Plusieurs fois j'ouvris la bouche pour la refermer aussitôt car je me sentais défaillir. J'avais l'impression que mon esprit ne fonctionnait plus normalement, qu'il s'était refermé face au choc. Le silence entre nous dura quelques minutes, le temps que je réussisse à parler sans fondre en larme. C'était la première fois que je pleurais autant, pourtant je n'étais pas du genre pleurnicheuse, loin de là. J'avais toujours été une fille forte, je ne me laissais jamais aller devant les autres, c'était une marque de faiblesse. Je sortis un mouchoir de ma poche et essuya les traces mascara sur les joues, qui me donnaient un air de jeune femme droguée. Puis enfin je réussis enfin à lui répondre :

-« Moi ?! Égoïste ?! Tu oublis certaines choses je crois ! Tu aurais dut me parler de tout ça parce que c'est ce que font les meilleurs amis non ? Hors tu as préféré t'en aller et me railler de ta vie. Mais n'as tu pas été égoïste toi aussi ?! N'as tu pas pensé à ton bonheur avant tout en partant sans aucune explication, en m'évitant à chaque fois qu'on se croisé dans les rues de New York ?! Ne crois pas tu pas que j'ai été blessé par ton comportement. Je ne comprenais pas, je voulais des réponses. Si tu m'avais dit tout de suite ce que tu ressentais, que tu ne voulais plus de moi dans ta vie, j'aurais certes été déçue mais j'aurais respecté ton choix ! Je ne serais donc jamais venue ici et cet idiot de loup ne m'aurait jamais mordu et donc j'aurais continuer ma petite vie de bourge tranquille sans venir t'emmerder. Oui, je ne me suis jamais mis à ta place parce que ce qui t'est arrivé m'a toujours hanté. Je n'y suis pour rien si tu as eut cet accident. Et surtout, contrairement à toi j'ai été franche, toi, tu as préféré être hypocrite avec moi : je te dégoute, je le sais. Mais qui voudrait devenir un loup-garou ? Si tu veux ses capacités surnaturel prends les ! Je n'en veux pas ! ».

Je repris ma respiration et inspira un bon coup afin d'essayer de me calmer un peu. Pendant quelques secondes, mes tremblements semblèrent s'apaiser avant de reprendre brusquement. Je devais terminer cette conversation rapidement ou je finirais par le blesser, ce que je ne voulais pas, pourtant, après tout ce qu'il venait de me dire, j'aurais dut vouloir son malheur, j'aurais dut vouloir le blesser, j'aurais dut éprouver une colère sans pareil contre lui, mais, je n'y arrivais pas ... du moins, pas complètement. Je ne laissais toute fois rien paraitre. J'avais assez pleurer, il fallait maintenant que je sois forte.

-« Je pense au contraire que je n'ai pas été assez égoïste ... J'aurais dut rester à New York et continuait tranquillement ma petite vie de gymnaste et ne pas abandonnée l'entrainement pour toi. Je n'aurais au moins pas été un problème pour toi et je n'aurais pas bouleversé ta petite vie tranquille que tu t'es faite ici ! Je ne penserais pas que je te dirais ça un jour mais je te hais. ».

Mes émotions étaient trop forte, mes sentiments contradictoires, je devenais incohérente. J'avais l'impression que j'allais exploser. J'avais déjà très chaud tant dis que ma température continuait de monter. Je n'en revenais pas d'avoir réussi à me contrôler aussi longtemps. Je reculai de quelques pas pour ne pas lui faire de mal. Je ne pu tenir plus longtemps. Je me métamorphosai.

J'avais honte de ce que je faisais à Nemesis. Nemesis, ma meilleure amie de toujours, celle avec qui j'avais passé les vingt premières années de ma vie, celle qui m'avais toujours soutenu. Mais je me sentais mal. J'avais perdu mes rêve, étais devenu un infirme, étais devenu un junkie et avait tué une jeune femme innocente. Toute cette culpabilité, toute cette peine, j'avais besoin de l'évacuer, mais je n'avais aucune idée de comment y parvenir. Alors la seule manière que j'avais trouvé, c'était de voir d'autres personnes souffrir encore plus que moi. Je l'avais d'abord fait avec Shea, la meilleure amie de Bleuenn, et maintenant je le faisais avec Nemesis. C'était un stratagème totalement idiot : je faisais souffrir les autres, me sentais mieux quelques jours, puis ma culpabilité revenait, encore plus grosse qu'avant suite à mes méchancetés envers les autres. Culpabilité envers toutes ces vies que je pourrissais. Envers ma famille et mes amis, que j'avais abandonné, car c'était bien ce que j'avais fait. Envers Bleuenn que j'avais poussé au suicide. Envers Shea, sur qui je rejetai la mort de Bleuenn alors qu'elle n'y avait rien à voir, de près ou de loin. Envers Nemesis, qui était devenue un monstre à cause de moi. Et pour évacuer cette culpabilité, il faudrait que je bousille encore la vie de quelqu'un. C'était un véritable cercle vicieux qui ne finirait surement qu'avec ma mort.

Nemesis avait raison... J'aurai surement agi de la même manière qu'elle si j'avais été à sa place. Elle avait tous les droits de me haïr, et que ce soit le cas ne m'étonna pas du tout. Mais cela me fit quand même comme un électro-choc. Une décharge d'électricité me parcourut le corps, partant de mon coeur. Il battait désespérément vite, me donnant des coups de marteau douloureux dans ma poitrine. Je suffoquais, incapable de dire un mot.

Ça faisait mal. Mal d'entendre ces mots de haine venant de celle qui a été pendant longtemps ma meilleure amie. Peut être bien que malgré tout ça, elle l'est toujours à mes yeux. Au rythme des battements effrénés de mon coeur défilaient les images de tout ce qui me manquait, de toutes mes erreurs, de tout ce que j'aurais voulu changer. La tête me tournai, et j'haletai.

Nemesis aussi, tremblait. Elle semblait lutter contre une force intérieure trop forte pour elle. Puis elle recula. Et il se passa quelque chose que je ne compris d'abord pas. Je voyais Nemesis se transformer en louve devant moi, mais mon cerveau refusait d’analyser ce que je voyais, tellement la chose me paraissait grotesque et absurde. Je savais que Nemesis était une lycan, elle me l'avait dit. Mais entre savoir et voir, il y a un fossé énorme. Savoir, cela reste dans l'abstrait. On sait que c'est vrai, mais tant qu'on ne l'a pas vu, ce n'est pas officiel.

Je restai la, comme un idiot fini, absorbé et horrifié à la fois par la transformation de Nemesis. Hébété, sans comprendre, je voyais ses habits se déchirer, ses membres grandir, son visage se couvrir de poils. Et ses yeux. Mon dieu, ses yeux. Ils restent la chose la plus terrifiante que je n'aie jamais vue, jamais imaginée. Son regard est devenu inhumain, bestial, sadique, cruel. Ses yeux. Longtemps après ce soir là dans les ruelles de Forks j'allais m'en souvenir, hantant inlassablement mes nuits.

Au bout de deux secondes d’immobilité totale qui me parurent durer des heures, une éternité, un cri s'échappa de ma gorge. Je me retournais, cherchant un quelconque soutient. Mais il se faisait tard, et tout le monde s'était empressé de rentrer chez eux. Il ne faisait pas bon de traîner à Forks la nuit tombée. C'était ce que j'apprenais à mon insu.

Sans savoir quoi faire, sans un regard en arrière, je m'élançai dans un sprint. Je ne pensais pas pouvoir courir à une telle vitesse avec mes problèmes de dos et ma jambe mal foutue. Mais insensible à ma douleur, stimulé par ma peur, je courrai du plus vite que je pouvais.

Je poussais un second cri, de douleur cette fois, quand ma jambe malade s'écroula sur mon poids. J'avais à peine fait une quinzaine de mètres que je me cassais la gueule. Mes mains étaient en sang, mais je n'avais aucune blessure grave. Ce qui, une louve haute de deux mètres fonçant sur moi, ne serait pas le cas très longtemps. « Redeviens Nemesis ! Redeviens Nemesis, merde ! Ce n'est pas toi ! Tu n'es pas un monstre ! Nemesis, si tu m'entends, redeviens toi même. » Des larmes me coulaient sur les joues. Ma vie n'était peut être pas toute rose, mais je ne voulais pas mourir.